Publié le 23 novembre 2021
Le télétravail à l’épreuve de la RSE… (ou l’inverse !)
La crise de la Covid a donné un coup d’accélérateur au télétravail. Mais quels sont les impacts du télétravail sur la RSE et la QVT ? Comment mettre en place le télétravail sans ruiner les efforts des organisations en termes de RSE ? Voici quelques conseils, en partie issus du Podcast « Le Télétravail est-il RSE ? » de l’ANDRH présenté par Marie-Céline Plourin, Directrice développement durable chez Edenred et Aurélia Andreu-Menny, DRH de Neos-SDI.
Conditions de télétravail équitables : prendre le temps du dialogue social
Plus ponctuel avant la crise de la Covid, le télétravail s’est développé de manière très rapide avec la pandémie. A cette occasion, des millions de personnes ont expérimenté le télétravail à temps complet pendant de longs mois.
Malgré des réalités parfois compliquées et l’isolement physique, le confort et la flexibilité perçus du télétravail sont devenus des prérequis pour de nombreux professionnels et candidats. Ce faisant, les changements organisationnels et culturels en entreprise se sont accélérés, avec des conséquences non négligeables.
Equilibre des temps de vie, droit à la déconnexion et confidentialité des données professionnelles
Tout d’abord, la perméabilité des « espaces-temps » révèle plusieurs enjeux. Parmi ces derniers, l’on peut citer le respect de l’équilibre vie professionnelle – vie privée et de la séparation des temps… Mais également le droit à la déconnexion… Ou encore la sécurité et confidentialité des données de l’entreprise dans un espace extérieur ; qu’il soit le domicile, la résidence secondaire ou bien encore un espace de coworking.
Le management hybride
Par ailleurs, de nouvelles formes de management à distance ou hybrides ont émergé. Atteinte des objectifs ; QVT ; collaboration ; confiance ; préservation de rituels fédérateurs et de la culture de l’entreprise … Le rôle du manager s’est complexifié avec le télétravail dans un environnement plus digital.
Equité des conditions de télétravail et prévention des risques et RPS
Enfin, en lien avec les enjeux cités plus haut, le télétravail repose la question de l’équité et de la prévention des risques professionnels et psychosociaux.
En effet, le télétravail cache des réalités très différentes de mise en œuvre. Il y a travailler dans sa cuisine ou sur une table basse … Avec parfois des enfants à proximité à gérer ou bien le co-locataire au téléphone… Et il y a travailler dans une pièce bien aménagée en bureau, bien éclairée et bien insonorisée. Avec en toile de fond la répartition des tâches du foyer dans les familles et les disparités d’équipements et de compétences avec les outils digitaux… Ainsi que l’isolement et la solitude plus ou moins ressentis selon les personnes. Ces inégalités constituent le terreau de risques professionnels physiques et psycho-sociaux plus ou moins élevés.
Pour toutes ces raisons, prendre le temps du dialogue social dans le cadre de la mise en place du télétravail est nécessaire. Ceci également afin d’en cerner les impacts sociétaux et environnementaux en lien avec la RSE de l’organisation.
Télétravail : s’appuyer sur les études de postes et de risques du DUERP
Dans ce temps du dialogue social, les études de postes et de risques réalisées dans le cadre du DUERP annuel (Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels) peuvent être de sérieux atouts. Les informations de ces études sont utiles pour mettre en place le télétravail en restant connecté aux objectifs RSE.
Evaluer, organiser et anticiper le travail
Tout d’abord, ces études permettent d’évaluer les tâches qui peuvent être réalisées en télétravail. Mais également celles qui ne le peuvent pas. Grâce à ces informations, il est possible de mieux organiser en amont le travail des équipes et leurs rotations. Et ce, notamment en période de pandémie.
Equiper les collaborateurs pour prévenir les risques
De surcroît, l’étude des postes donne une idée des conditions de travail minimum dont doit pouvoir bénéficier un collaborateur pour bien effectuer son travail. Prendre en compte cette donnée permet d’équiper correctement les collaborateurs. Ainsi, un équipement adapté et ergonomique permettra de prévenir les problèmes de vue et auditifs, les lombalgies et autres TMS. En d’autres termes, bien équiper contribue à la fois à préserver la santé des collaborateurs et la performance de l’entreprise en limitant l’absentéisme et les frais de santé.
Accompagner et former les collaborateurs aux outils numériques, au travail à distance et au management
Par ailleurs, le DUERP donne la possibilité d’orienter les publics plus en difficulté vers l’une ou l’autre forme de travail, en prenant aussi en considération les souhaits exprimés. Cela permet d’éviter d’isoler des personnes déjà fragiles ; d’adapter le management ; de proposer des formations à certains outils numériques… En outre, cela va de pair, de manière plus générale, avec la mise en place de règles de déconnexion et de relations à distances. Ces dernières permettent de maintenir un lien entre les collaborateurs et avec les valeurs de l’entreprise qui portent sa politique RSE et donnent du sens au travail collectif et individuel.
Calibrer le Flex Office
Enfin, de nombreuses entreprises ont vu dans le télétravail l’occasion de réaliser des économies de mètres carrés, surtout dans les centres-villes onéreux. En faisant venir les collaborateurs sur place par rotation, elles peuvent opter pour le Flex-Office équipé de postes de travail non nominatifs. Il est nécessaire cependant de prévoir une jauge suffisante pour que ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas travailler chez eux puissent avoir de la place dans ces Flex Office.
Bilan carbone du télétravail : les impacts sur la RSE
On pense souvent que le télétravail est « vert » parce qu’il réduit le temps de transport. Cependant, le télétravail n’a pas que des avantages environnementaux.
En effet, sauf disposition spécifique, un collaborateur peut, par exemple, choisir de travailler partiellement depuis sa résidence secondaire située à 150 km de son entreprise ; plutôt que de son domicile, situé à 8 km de son entreprise. S’il vient 2 jours par semaine dans son entreprise en voiture, plutôt qu’en transport en commun, le bilan carbone sera nécessairement plus lourd.
Par ailleurs, les contreparties et conditions nécessaires au télétravail peuvent également avoir des impacts environnementaux non négligeables, et ainsi affecter les indicateurs RSE de l’entreprise.
L’impact carbone du suréquipement informatique
En effet, dans la mise en place du télétravail, les entreprises doivent considérer l’impact du suréquipement informatique. Là où un poste fixe était suffisant en entreprise, il faut souvent doubler l’équipement pour que le collaborateur puisse travailler de chez lui dans de bonnes conditions et en toute sécurité. Ainsi, souvent, il est nécessaire de proposer un ordinateur portable pas trop lourd, mais avec un écran suffisamment confortable pour y travailler une journée entière. A cela peut s’ajouter un casque… Et même parfois un bureau et un fauteuil ergonomique afin de protéger la santé du collaborateur. Le bilan carbone de l’entreprise s’alourdit donc de ce suréquipement informatique. En effet, elle doit comptabiliser les matières premières, l’énergie, et le transport … entrant dans la fabrication et livraison de ce matériel.
L’impact carbone du stockage et des flux de données
Par ailleurs, il faut aussi prendre en compte dans les aspects environnementaux, le carbone supplémentaire nécessaire aux flux, à l’échange et au stockage des données. Sans oublier l’utilisation de systèmes de visio-conférences, d’applications ou d’outils digitaux spécifiques nécessitant la création de comptes utilisateurs. Plus d’emails, plus d’échanges virtuels, plus d’espaces partagés, c’est plus de carbone.
L’impact carbone de l’énergie doublement dépensée
S’ajoute également dans ce bilan carbone, l’énergie dépensée pour chauffer, éclairer et faire fonctionner les équipements au domicile du collaborateur alors que les bureaux de l’entreprise sont déjà chauffés et éclairés.
Télétravail ou RSE ? Les deux mon général !
Pour conclure, un des challenges des entreprises réside donc dans la convergence entre la politique de RSE, le télétravail, mais aussi le maintien d’une certaine QVT dans l’entreprise. Le tout, bien sûr, en restant performantes.
Télétravail, RSE et QVT : recherche de convergence au service de l’amélioration continue
Dans ce processus d’amélioration continue, la recherche de compatibilité des trois volets – télétravail, RSE et QVT – permet de guider les démarches des entreprises. Elle montre également que les entreprises ont, depuis longtemps, dépassé la simple mission d’acteurs économiques, notamment dans le secteur agroalimentaire, à la croisée de tous les enjeux.
Flexibilité, impacts et QVT : ingrédients de la marque-employeur
Cette recherche de convergence transpire de la marque-employeur, baromètre de l’attractivité des entreprises… Cela tombe bien ! Car les candidats et professionnels, en quête de flexibilité, souhaitent pouvoir mieux concilier leur vie professionnelle et leur vie privée. Par ailleurs, ils sont de plus en regardants concernant le degré de conscience sociétale et environnementale des entreprises. Sans parler de la QVT dont les collaborateurs sont les ambassadeurs directs.
A suivre …
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